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Face aux craintes occidentales, Moscou énonce le principe d’inadmissibilité d’une guerre nucléaire

Alors que les Etats-Unis ont à nouveau exprimé leurs craintes de voir la Russie recourir à des armes atomiques, celle-ci a réaffirmé le caractère défensif de sa doctrine, et appelé à éviter tout conflit entre puissances nucléaires.

La Russie a tenu à effectuer une nouvelle mise au point concernant un recours à des armes nucléaires ce 2 novembre. Cette déclaration intervient après que le New York Times s’est fait l’écho «de nombreux officiels américains», selon lesquels des militaires russes de haut rang auraient discuté récemment du moment et de la manière d’utiliser de telles armes en Ukraine.

La Russie est strictement et systématiquement guidée par le principe de l’inadmissibilité d’une guerre nucléaire 

Selon les sources anonymes contactées par le quotidien new-yorkais, le président Vladimir Poutine n’a pas participé à ces échanges et aucun signe de préparatifs concrets n’a été détecté, mais ces discussions, dont Washington aurait eu connaissance vers la mi-octobre, ont malgré tout renforcé l’inquiétude dans les capitales occidentales, qui se demandent si le Kremlin pourrait en arriver à une telle extrémité.

Les Etats-Unis sont devenus «au fil des mois» de «plus en plus préoccupés par cette éventualité» d’une potentielle frappe nucléaire, a quant à lui réagi John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale rattaché au président américain Joe Biden. Le porte-parole a ainsi affirmé que les déclarations russes sur un possible usage de l’arme nucléaire étaient «très inquiétantes» et que Washington les prenait «très au sérieux», tout en précisant, comme les sources anonymes du New York Times, n’avoir «aucune indication que la Russie se prépare à en faire usage».

La prévention de tout affrontement militaire entre les puissances nucléaires devient une priorité

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a pour sa part jugé «irresponsable» que les médias occidentaux «gonflent délibérément le sujet des armes nucléaires» et affirmé que Moscou n’a «pas la moindre intention de prendre part» à ce débat. Le ministère russe des Affaires étrangères a publié un communiqué détaillé sur le sujet, rappelant tout d’abord que «la Russie est strictement et systématiquement guidée par le principe de l’inadmissibilité d’une guerre nucléaire dans laquelle il ne peut y avoir de vainqueur et qui ne doit jamais être déclenchée».


Kiev «rejette toute proposition de négociation», souligne Poutine

Soulignant la clarté de la doctrine de Moscou en la matière, le ministère réaffirme que ses conceptions «sont purement défensives et ne permettent pas une interprétation extensive». Sur un plan théorique, la Russie ne peut ainsi réagir à l’aide de l’arme nucléaire qu’«en réponse à une agression au moyen d’armes de destruction massive ou à une agression à l’aide d’armes classiques, lorsque l’existence même de l’Etat est menacée», et non y recourir pour l’emporter dans le cadre du conflit ukrainien.

Le ministère des Affaires étrangère réaffirme aussi son attachement à la déclaration conjointe des dirigeants de cinq Etats dotés d’armes nucléaires (Chine, France, Russie, Royaume-Uni, Etats-Unis) sur la prévention d’une guerre nucléaire et de la course aux armements, en date du 3 janvier 2022, et met en exergue l’importance de prévenir toute escalade du conflit avec Kiev, sans le citer explicitement. «Nous sommes fermement convaincus que, dans la situation difficile et turbulente actuelle, résultant d’actions irresponsables et sans scrupules visant à saper notre sécurité nationale, la prévention de tout affrontement militaire entre les puissances nucléaires devient une priorité», développe le communiqué. 

Dans ce cadre, Moscou invite les autres pays dotés de l’arme atomique «à renoncer aux tentatives dangereuses de porter atteinte aux intérêts vitaux des uns et des autres, en vacillant au bord d’un conflit armé direct et en encourageant des provocations avec des armes de destruction massive», faisant ainsi référence à la fois au soutien affiché de l’Occident à l’Ukraine et à la crainte récemment exprimée par la Russie que cette dernière emploie une «bombe sale» sur le terrain. Si ces hypothèses venaient à se matérialiser, elles pourraient «avoir des conséquences désastreuses», avertit ainsi Moscou.

Medvedev incrimine les revendications territoriales de Kiev

La veille, le 1er novembre, le président du parti Russie unie et vice-président du Conseil de sécurité, Dmitri Medvedev, avait évoqué sur Telegram le sujet de la dissuasion nucléaire en commentant la volonté affichée par les pays occidentaux de ne pas laisser Moscou l’emporter en Ukraine. Dmitri Medvedev a invité à prendre en compte la volonté affichée par Kiev de «reprendre tous les territoires qui lui appartenaient auparavant», incluant donc le Donbass et la Crimée.

Selon lui, ce projet d’«arracher» à la Russie des territoires rattachés à la suite de référendums – contestés par Kiev et ses alliés – «menace l’existence de [l’Etat russe] et [signifie] l’effondrement de la Russie actuelle», ce qui pourrait être une «raison suffisante» pour justifier l’emploi d’armes atomiques, dans le cadre défensif défini par l’article 19 des principes encadrant la dissuasion nucléaire russe. Pour Dmitri Medvedev, ce sont «les pays occidentaux [qui] poussent le monde vers une guerre mondiale», seule une «victoire complète et finale de la Russie» pouvant apporter la garantie d’éviter un conflit mondial.

Début octobre, le chef de la diplomatie russe  Sergueï Lavrov avait déjà critiqué le positionnement des Occidentaux sur le risque nucléaire, les accusant de «déformer» la réalité en tentant «de présenter la situation comme si c’est la Russie qui lançait des menaces nucléaires», alors que plusieurs dirigeants, dont l’éphémère Premier ministre britannique Liz Truss, avait abordé le sujet avec «légèreté» en se disant «prête» à user de la force nucléaire, même si cela conduisait à une «annihilation totale» de la planète. Le président américain Joe Biden avait pour sa part jugé, le 6 octobre, que les menaces actuelles faisaient courir au monde un risque d’«apocalypse».




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