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Système de combat aérien du futur : Berlin annonce un accord sur le démonstrateur de vol

Le ministère allemand de la Défense a annoncé que les industriels désignés pour ce projet étaient parvenus à un accord sur la phase 1B. Malgré les réjouissances politiques, rien n’est gagné pour le programme européen qui patine depuis des années.

Le système de combat aérien du futur (SCAF) «se fera» fin septembre promet Sébastien Lecornu depuis Berlin. C’est effectivement depuis la capitale allemande que l’annonce du déblocage de ce projet militaro-industriel, dont la France avait été désignée «nation leader», est venue. Dans un communiqué publié le 18 novembre, le ministère fédéral de la Défense annonce qu’un accord entre industriels avait été conclu sur la phase 1B qui vise à définir l’architecture du démonstrateur avion.

Une «étape magnifique» s’est réjoui Christine Lambrecht, ministre allemande de la Défense, «et particulièrement à l’heure actuelle, un signal important de l’excellente coopération entre l’Allemagne, la France et l’Espagne» a-t-elle poursuivi. Un «grand pas en avant» a pour sa part salué l’Elysée. Des termes également employés par Airbus, dont la branche munichoise représente les intérêts à la fois de Berlin et de Madrid dans ce projet industriel. Dassault Aviation, maitre d’œuvre de ce projet industriel lancé en 2017, n’a pour l’heure pas réagi.

Un programme dans «l’impasse» depuis près de deux ans

Cette annonce survient dix-huit mois après celle d’un premier accord, entre politique et industriels, sur le partage des tâches et la propriété intellectuelle (IPR). Des problématiques au cœur des dissensions entre les partenaires industriels. Annoncé mi-mai et signé fin août 2021 par les gouvernements allemand, espagnol et français notamment afin de débloquer les fonds, ce texte devait marquer la «fin de l’impasse» sur le programme européen. «Un grand pas a été franchi» se félicitait, déjà, à l’époque un porte-parole de la Direction générale de l’armement (DGA). Bien qu’ils soient tombés d’accord entre eux courant mars, la rivalité entre Airbus et Dassault a perduré.


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C’est donc avec une certaine retenue que l’annonce de cet accord entre les industriels est accueillie par la presse spécialisée. Une annonce qu’elle avait anticipé tout en soulignant aujourd’hui que rien n’est joué pour le chasseur européen du futur. Une ligne elle-même défendue par Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation. Lors d’une interview accordée mi-octobre au site britannique d’informations FlightGlobal, le patron de l’avionneur tricolore avait mis en garde que tout progrès sur la phase 1B ne signifiait en rien que le NGF «sera un succès».

En effet, à chaque point d’étape, le projet devra passer sous les fourches caudines du Bundestag. Le Parlement allemand, connu tant pour son orthodoxie budgétaire que pour sa défense farouche des intérêts industriels nationaux, a déjà mis plus d’une fois des bâtons dans les roues à la coopération franco-allemande souhaitée par Paris.

Or, comme le souligne La Tribune, les élus outre-Rhin ont placé la barre haut dès juin 2021, lors du vote de l’enveloppe budgétaire de la phase 1B sur laquelle ils conservent un droit de regard. Les membres de la commission budgétaire de la chambre basse du Parlement ont en effet exigé une répartition des travaux sur le SCAF prenant mieux en considération les intérêts allemands. Ils ont également exigé que ce programme, piloté par la France, avance au «même rythme» que son pendant terrestre le MGCS (Main Ground Combat System) placé quant à lui sous l’égide de l’Allemagne. Un impératif «irréaliste» juge le quotidien économique.

Des industriels soucieux de préserver leurs intérêts

Des exigences qui vont dans le sens des inquiétudes des instances allemandes. Quelques semaines avant ce vote au palais du Reichstag, Der Spigel avait révélé deux rapports confidentiels. L’un avait été rédigé par l’Office fédéral des équipements, des technologies de l’information et du soutien en service de la Bundeswehr, l’autre du ministère allemand de la Défense. Le premier estimait que le fameux accord, sur la phase 1B, n’allait «pas dans le sens des intérêts allemands» et appelait ainsi à en «renégocier» les éléments techniques et économiques. Le second s’inquiétait du «positionnement fort» de la France dans ce programme qu’elle est pourtant censée chapoter.

Impulsé à l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Elysée, le programme SCAF est devenu le totem de la coopération franco-allemande souhaitée par Paris. Ce programme militaro-industriel fut lancé, en parallèle à d’autres, tels que le MGCS ou encore celui des patrouilleurs maritimes (MAWS). Malgré la volonté affichée de Paris de faire avancer ces projets, la coopération avec Berlin semble battre de l’aile. Depuis l’arrivée au pouvoir à Berlin d’une nouvelle coalition menée par Olaf Scholz, dans un contexte marqué par le conflit ukrainien, les dissensions entre les deux voisins en matière de défense européenne sont devenus plus criantes.

Durant son discours de Toulon, le 9 novembre, où il présentait sa nouvelle mouture de la Revue nationale stratégique, Emmanuel Macron avait appelé à «des avancées décisives dans les prochaines semaines» sur le partenariat franco-allemand. Le président français estimant que de l’«équilibre» de ce dernier dépendait «pour partie, la réussite du projet européen» qui lui est si cher.

Maxime Perrotin




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